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fantômes et fantoches

« Il remarqua bientôt qu’on le suivait et s’arrêta devant l’étalage d’un épicier pour regarder l’homme sans en avoir l’air. Burton ! C’était Burton ! Que lui voulait-il donc ? N’avait-il pas renoncé ostensiblement à Madeleine ?

« Et Jacques sentit un grand frisson le parcourir. L’anxiété des pressentiments le fit trembler. Un but sinistre approchait, inévitable. Il reprit sa marche à pas saccadés, l’esprit troublé de raisonnements inconnus : Burton allait le tuer… Et n’était-ce pas son droit humain de supprimer le ravisseur de ses joies ?

« Jacques se mit à marcher plus vite. Mais Burton ne se laissa pas distancer.

« Que faire ?

« Implorer le secours d’un gardien de la paix ?

« Quel policier croirait à un crime non encore accompli ?

« Pour quel motif requérir l’arrestation du banquier ?

« L’attendre et se battre ?

« Jacques savait qu’il ne vaincrait pas.

« Comme ils étaient tout près de l’atelier, il se mit à fuir. La poursuite éperdue traversa les groupes, s’engouffra dans le vestibule et galoppa dans l’escalier.

« Jacques perdit toute avance en ouvrant sa porte.