Page:Renard - Fantômes et fantoches, 1905.djvu/167

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
151
amaryllis

quer un fantôme honteux, pour sculpter dans l’air de ces bois un corps de poupée qu’il eut coutume de caresser et qui tant de fois vint s’y mouler.

Jure-moi de ne pas rechercher dans le gazon l’empreinte disparue de pieds en terre cuite, de ne point t’asseoir sous l’orme comme au temps où battait contre ton cœur un cœur de plâtre dont tu t’imaginerais percevoir le rhythme. Est-il bien entendu que tu ne flagelleras pas les arbres comme autant de centurions ?

tityrus

J’en fais le serment, mais tais-toi, tu plaisantes faux… tu me ferais pleurer… je ne suis pas encore tout à fait rétabli… tu me ferais pleurer sur ma bêtise… sur ma ridicule bonne foi…

melibœus

Tu as encore dans les yeux beaucoup de la poussière que l’Amour méchant t’a jetée afin de t’aveugler, c’est pourquoi tu vois partout de la cendre. Cette poudre-là ne s’en va qu’avec les larmes, mais crois-moi, elles te sembleront moins amères à les verser contre une épaule amie que sur le sein d’un mauvais souvenir.

tityrus

Je cherche ici l’oubli, pas autre chose, je le