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le bourreau de dieu

apparemment sacrilège, allant de l’autel de Dieu au comptoir du cabaretier.

Marcoux paraissait heureux de cette affection subite, et l’on s’étonnait de le voir agir envers le vieillard avec une déférence qui ne se démentait jamais.

Cependant l’automne s’effeuilla sur les fleurs, et la neige couvrit les feuilles, puis elle commença de fondre.

Pâques s’en revenait.

Au pied des crucifix vêtus de violet, Christophe priait sans relâche, et son nouvel ami, sans doute mécontent d’être délaissé, errait, farouche, au hasard.

L’habitude de voir le sabotier avait atténué ses extravagances. Nul n’y trouvait à redire à présent, et l’on oubliait même que son entendement fût endommagé, tellement les hommes ont de peine à distinguer sans cesse la raison d’avec l’incohérence.

Aussi les fidèles ne faisaient-ils pas plus attention à lui dans le chœur que les buveurs à l’auberge.

Le jour du vendredi saint, on s’aperçut que le grand autel n’était pas complet. Quelque chose y manquait. Quoi donc ? Un candélabre ? Un vase ?

C’était Christophe.