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tokutaro et murasaki

« Glycines, stalactites diaprées à la voûte des branches, que votre Amant resplendisse au fond de votre songe, rêvez d’un baiser du Soleil…

« Voici des phalènes silencieuses dont l’aile vous effleure de son haleine. Elles sont comme vous des créatures fragiles, à la forme désordonnée, aux couleurs capricieuses ; on dirait, chacune, deux petits éventails éperdus aux mains fébriles des Kamis. Et si vous les embaumez de tous vos encensoirs, les Génies de l’air viennent vous éventer avec des papillons…

« Hélas, en parlant de vous je pense à Murasaki ; car elle serait Déesse chez les Fleurs et parmi les Dieux serait Fleur !

« Que je voudrais entendre sur sa bouche écarlate, comme sur une corolle de rose rouge, bruire, frisson de libellule enchantée, le premier baiser où mon âme se poserait… »

À ces paroles audacieuses, Murasaki n’y tint plus. Le Démon dépassait toute mesure. Elle voulut le confondre et en finir une bonne fois avec l’Apparition dévergondée.

Elle se précipita sur le balcon et cria :

— Lutin malicieux, faux homme ! T’en iras-tu bientôt ? Va, tu ne m’as point dupée, tu n’es autre que Tanuki, le blaireau. Va-t-en ! Va-t-en porter