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un saut hors de sa demeure : il est pris.

— N’aie pas peur, dit le poète, on va jouer tous deux.

Il le relâche, le laisse aller. Le grillon libre disparaîtrait sous les hautes herbes. Deux doigts le pincent à temps : le voilà sur le dos.

Le poète étudie son abdomen brun, le jeu des pattes cirées et s’émerveille des dents, scies délicates, inimitables par l’industrie humaine. Il le retourne et le grillon suit le bord de la main, culbute au creux, se relève, court au bout d’un doigt et s’y tient coi.

— On s’amuse, hein ! petit ? dit le poète.

Enfin il le met dans son chapeau, croise les jambes, rêveur, vite attendri, regarde se coucher le soleil.

Est-ce beau !

Ses bras s’écartent d’eux-mêmes et nagent vers l’horizon, où fume encore le soleil refroidi.

Cependant le grillon, un moment blotti, quitte la doublure du chapeau, pousse une reconnaissance hardie, explore les ténèbres, quête parmi les touffes de cheveux, enfile des