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BUCOLIQUES

Finis coronat opus.

De ses courtes études au collège, il n’avait guère retenu que ces trois mots. Il pouvait les traduire exactement : Finis, la fin, coronat, couronne, opus, l’œuvre. Cela signifiait :

— J’ai bien mangé, avec appétit, d’un bout à l’autre de mon déjeuner. La dernière bouchée ne valait pas moins que la première. La fin était digne du début.

Longtemps cette maxime lui parut claire et commode. Il l’expliquait en famille, aux amis, sans se tromper, comme pour dire :

— Vous le voyez, il me reste quelque chose du latin que j’ai appris.

— Ce fut le sens du mot opus qui s’obscurcit d’abord. Hubert ne trouvait qu’avec peine le mot correspondant. Il le perdit tout à fait. Opus n’était plus qu’un sou étranger, percé, cassé, rouillé, sans valeur.

— Supprimons opus, se dit Hubert.

Et il prit l’habitude de refuser une moitié de pomme, un verre de liqueur en ces termes :