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très-longtemps après[1]. Nous sommes donc ici sur un terrain solide ; car il s’agit d’un ouvrage tout entier de la même main et de la plus parfaite unité.

Les Évangiles de Matthieu et de Marc n’ont pas, à beaucoup près, le même cachet individuel. Ce sont des compositions impersonnelles, où l’auteur disparaît totalement. Un nom propre écrit en tête de ces sortes d’ouvrages ne dit pas grand’chose. On ne peut, d’ailleurs, raisonner ici comme pour Luc. La date qui résulte de tel chapitre (par exemple Matth., xxiv ; Marc, xiii) ne peut rigoureusement s’appliquer à l’ensemble des ouvrages, ceux-ci étant composés de morceaux d’époques et de provenances fort différentes. En général, le troisième Évangile paraît postérieur aux deux premiers, et offre le caractère d’une rédaction bien plus avancée. On ne saurait néanmoins conclure de là que les deux Évangiles de Marc et de Matthieu fussent dans l’état où nous les avons, quand Luc écrivit. Ces deux ouvrages dits de Marc et de Matthieu, en effet, restèrent longtemps à l’état

  1. Versets 9, 20, 24, 28, 29-32. Comp. xxii, 36. Ces passages sont d’autant plus frappants que l’auteur sent l’objection qui peut résulter de prédictions à si courte échéance, et y pare, — soit en adoucissant des passages comme Marc, xiii, 14 et suiv., 24, 29 : Matth., xxiv, 15 et suiv., 29, 33, — soit par des réponses comme Luc, xvii, 20, 21.