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rendit l’âme aussitôt après avoir bu le vinaigre[1]. Il est bien plus probable qu’une apoplexie ou la rupture instantanée d’un vaisseau dans la région du cœur amena pour lui, au bout de trois heures, une mort subite. Quelques moments avant de rendre l’âme, il avait encore la voix forte[2]. Tout à coup, il poussa un cri terrible[3], où les uns entendirent : « Ô Père, je remets mon esprit entre tes mains ! » et que les autres, plus préoccupés de l’accomplissement des prophéties, rendirent par ces mots : « Tout est consommé ! » Sa tête s’inclina sur sa poitrine, et il expira.

Repose maintenant dans ta gloire, noble initiateur. Ton œuvre est achevée ; ta divinité est fondée. Ne crains plus de voir crouler par une faute l’édifice de tes efforts. Désormais hors des atteintes de la fragilité, tu assisteras, du haut de la paix divine, aux conséquences infinies de tes actes. Au prix de quelques heures de souffrance, qui n’ont pas même atteint ta grande âme, tu as acheté la plus complète immortalité. Pour des milliers d’années, le monde va relever de toi ! Drapeau de nos contradictions, tu seras

  1. Matthieu, Marc et Jean semblent lier les deux faits.
  2. Matth., xxvii, 46 ; Marc, xv, 34.
  3. Matth., xxvii, 50 ; Marc, xv, 37 ; Luc, xxiii, 46 ; Jean, xix, 30.