Page:Renan - Vie de Jesus, edition revue, 1895.djvu/548

Cette page a été validée par deux contributeurs.

lait ajouter à la mort l’aggravation de l’ignominie. En l’appliquant à Jésus, on le traitait comme les voleurs de grand chemin, les brigands, les bandits, ou comme ces ennemis de bas étage auxquels les Romains n’accordaient pas les honneurs de la mort par le glaive[1]. C’était le chimérique « roi des Juifs », non le dogmatiste hétérodoxe, que l’on punissait. Par suite de la même idée, l’exécution dut être abandonnée aux Romains. À cette époque, chez les Romains, les soldats, au moins dans les cas de condamnations politiques, faisaient l’office de bourreaux[2]. Jésus fut donc livré à un détachement de troupes auxiliaires commandé par un centurion[3] et tout l’odieux des supplices introduits par les mœurs cruelles des nouveaux conquérants se déroula pour lui. Il était environ midi[4]. On le revêtit de ses habits, qu’on lui avait ôtés pour la parade de la tribune. Comme la cohorte avait déjà en réserve deux voleurs qu’elle devait mettre à mort, on réunit les trois condamnés, et le

  1. Jos., Ant., XVII, x, 10 ; XX, vi, 2 ; B. J., V, xi, 1 ; Apulée, Métam., III, 9 ; Suétone, Galba, 9 ; Lampride, Alex. Sev., 23.
  2. Tacite, Ann., III, 14. Voir ci-dessus, p. 421, note.
  3. Matth., xxvii, 54 ; Marc, xv, 39, 44, 45 ; Luc, xxiii, 47.
  4. Jean, xix, 14. D’après Marc, xv, 25, il n’eût guère été que huit heures du matin, puisque, selon cet évangéliste, Jésus fut crucifié à neuf heures.