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tisme, d’ailleurs, amène tous les pouvoirs à traiter avec lui. Pilate se crut obligé de faire quelque concession ; mais, hésitant encore à répandre le sang pour satisfaire des gens qu’il détestait, il voulut tourner la chose en comédie. Affectant de rire du titre pompeux que l’on donnait à Jésus, il le fit fouetter[1]. La flagellation était le préliminaire ordinaire du supplice de la croix[2]. Peut-être Pilate voulut-il laisser croire que cette condamnation était déjà prononcée, tout en espérant que le préliminaire suffirait. Alors eut lieu, selon tous les récits, une scène révoltante. Des soldats mirent sur le dos de Jésus une casaque rouge, sur sa tête une couronne formée de branches épineuses, et un roseau dans sa main. On l’amena ainsi affublé sur la tribune, en face du peuple. Les soldats défilaient devant lui, le souffletaient tour à tour, et disaient en s’agenouillant : « Salut, roi des Juifs[3]. » D’autres crachaient sur lui et frappaient sa tête avec le roseau. On comprend difficilement que la gravité romaine se soit prêtée à des actes si honteux. Il est vrai que Pilate,

  1. Matth., xxvii, 26 ; Marc, xv, 15 ; Jean, xix, 1.
  2. Jos., B. J., II, xiv, 9 ; V, xi, 1 ; VII, vi, 4 ; Tite-Live, XXXIII, 36 ; Quinte-Curce, VII, xi, 28.
  3. Matth., xxvii, 27 et suiv. ; Marc, xv, 16 et suiv. ; Luc, xxiii, 11 ; Jean, xix, 2 et suiv.