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d’individus rebelles à l’autorité sacerdotale, espèces d’auto-da-fé destinés à inculquer au peuple la terreur religieuse[1], on s’arrangeait probablement pour que de tels supplices ne tombassent pas dans les jours fériés[2]. L’arrestation fut donc fixée au lendemain jeudi. On résolut aussi de ne pas s’emparer de lui dans le temple, où il venait tous les jours[3], mais d’épier ses habitudes, pour le saisir dans quelque endroit secret. Les agents des prêtres sondèrent les disciples, espérant obtenir des renseignements utiles de leur faiblesse ou de leur simplicité. Ils trouvèrent ce qu’ils cherchaient dans Juda de Kerioth. Ce malheureux, par des motifs impossibles à expliquer, trahit son maître, donna toutes les indications nécessaires, et se chargea même (quoiqu’un tel excès de noirceur soit à peine croyable) de conduire la brigade qui devait opérer l’arrestation. Le souvenir d’horreur que la sottise ou la méchanceté de cet homme laissa dans la tradition chrétienne a dû introduire ici quelque exagération. Judas jusque-là avait été un disciple comme un autre ; il avait même le titre d’apôtre ; il avait fait des miracles et chassé les démons. La

  1. Mischna, Sanhédrin, xi, 4 ; Talm. de Bab., même traité, 89 a. Comp. Act., xii, 3 et suiv.
  2. Mischna, Sanhédrin, iv, 1.
  3. Matth., xxvi, 55.