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sous ce rapport, dans un monde analogue à celui des « spirites » de nos jours[1]. L’opinion populaire voulait, en effet, que la vertu divine fût dans l’homme comme un principe épileptique et convulsif[2]. Presque tous les miracles que Jésus crut exécuter paraissent avoir été des miracles de guérison. La médecine était à cette époque en Judée ce qu’elle est encore aujourd’hui en Orient, c’est-à-dire nullement scientifique, absolument livrée à l’inspiration individuelle. La médecine scientifique, fondée depuis cinq siècles par la Grèce, était, à l’époque de Jésus, à peu près inconnue aux Juifs de Palestine. Dans un tel état de connaissances, la présence d’un homme supérieur, traitant le malade avec douceur, et lui donnant par quelques signes sensibles l’assurance de son rétablissement, est souvent un remède décisif. Qui oserait dire que, dans beaucoup de cas, et en dehors des lésions tout à fait caractérisées, le contact d’une personne exquise ne vaut pas les ressources de la pharmacie ? Le plaisir de la voir guérit. Elle donne ce qu’elle

  1. Act., ii, 2 et suiv. ; iv, 31 ; viii, 15 et suiv. ; x, 44 et suiv. Pendant près d’un siècle, les apôtres et leurs disciples ne rêvent que miracles. Voir les Actes, les écrits de saint Paul, les extraits de Papias, dans Eusèbe, Hist. eccl., III, 39, etc. Comp. Marc, iii, 15 ; xvi, 17-18, 20.
  2. Marc, v, 30 ; Luc, vi, 19 ; viii, 46 ; Jean, xi, 33, 38.