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La Galilée contenait un grand nombre de païens, mais non, à ce qu’il semble, un culte des faux dieux public et organisé[1]. Jésus put voir ce culte se déployer avec toute sa splendeur dans le pays de Tyr et de Sidon, à Césarée de Philippe, et dans la Décapole[2]. Il y fit peu d’attention. Jamais on ne trouve chez lui ce pédantisme fatigant des juifs de son temps, ces déclamations contre l’idolâtrie, si familières à ses coreligionnaires depuis Alexandre, et qui remplissent, par exemple, le livre de la « Sagesse »[3]. Ce qui le frappe dans les païens, ce n’est pas leur idolâtrie, c’est leur servilité[4]. Le jeune démocrate juif, frère en ceci de Juda le Gaulonite, n’admettant de maître que Dieu, était très-blessé des honneurs dont on entourait la personne des souverains et des titres souvent mensongers qu’on leur donnait. À cela près, dans la plupart des cas où il rencontre des païens,

  1. Je crois que les païens de Galilée se trouvaient surtout aux frontières, à Kadès par exemple, mais que le cœur même du pays, la ville de Tibériade exceptée, était tout juif. La ligne où finissent les ruines de temples et où commencent les ruines de synagogues est aujourd’hui nettement marquée à la hauteur du lac Huleh (Samachonitis). Les traces de sculpture païenne qu’on a cru trouver à Tell-Hum sont douteuses. La côte, en particulier la ville d’Acre, ne faisaient point partie de la Galilée.
  2. Voir ci-dessus, p. 151-153.
  3. Chap. xiii et suiv.
  4. Matth., xx, 25 ; Marc, x, 42 ; Luc, xxii, 25.