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stante dans la première génération chrétienne[1]. On le supposa parent de Jésus[2]. Son baptême fut regardé comme le premier fait et, en quelque sorte, comme la préface obligée de toute l’histoire évangélique[3]. Pour fonder la mission du fils de Joseph sur un témoignage admis de tous, on raconta que Jean, dès la première vue de Jésus, le proclama Messie ; qu’il se reconnut son inférieur, indigne de délier les cordons de ses souliers ; qu’il se refusa d’abord à le baptiser et soutint que c’était lui qui devait recevoir le baptême de Jésus[4]. C’étaient là des exagérations, que réfutait suffisamment la forme dubitative du dernier message de Jean[5]. Mais, en un sens plus général, Jean resta dans la légende chrétienne ce qu’il fut en réalité, l’austère préparateur, le triste prédicateur de pénitence avant les joies de l’arrivée de l’époux, le prophète qui annonce le royaume de Dieu et meurt avant de le voir. Géant des origines chrétiennes, ce mangeur de sauterelles et de miel

  1. Act., xix, 4.
  2. Luc, i.
  3. Act., i, 22 ; x, 37-38. Cela s’explique parfaitement si l’on admet, avec le quatrième évangéliste (ch. i), que Jésus conquit ses premiers et plus importants disciples dans l’école même de Jean.
  4. Matth., iii, 14 et suiv. ; Luc, iii, 16 ; Jean, i, 15 et suiv. ; v, 32-33.
  5. Matth., xi, 2 et suiv. ; Luc, vii, 18 et suiv.