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3o pour les hérétiques et schismatiques, publicains, samaritains, païens de Tyr et de Sidon. Une parabole énergique expliquait cet appel au peuple et le légitimait[1] : Un roi a préparé un festin de noces et envoie ses serviteurs chercher les invités. Chacun s’excuse ; quelques-uns maltraitent les messagers. Le roi alors prend un grand parti. Les gens comme il faut n’ont pas voulu se rendre à son appel ; eh bien, ce seront les premiers venus, des gens recueillis sur les places et les carrefours, des pauvres, des mendiants, des boiteux, n’importe ; il faut remplir la salle, « et je vous le jure, dit le roi, aucun de ceux qui étaient invités ne goûtera mon festin. »

Le pur ébionisme, c’est-à-dire la doctrine que les pauvres (ébionim) seuls seront sauvés, que le règne des pauvres va venir, fut donc la doctrine de Jésus. « Malheur à vous, riches, disait-il, car vous avez votre consolation ! Malheur à vous qui êtes maintenant rassasiés, car vous aurez faim ! Malheur à vous qui riez maintenant, car vous gémirez et vous pleurerez[2] ! » « Quand tu fais un festin, disait-il encore, n’invite pas tes amis, tes parents, tes voisins riches ; ils t’inviteraient à leur tour, et tu aurais ta récom-

  1. Matth., xxii, 2 et suiv. ; Luc, xiv, 16 et suiv. Comp. Matth., viii, 11-12 ; xxi, 33 et suiv.
  2. Luc, vi, 24-25.