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d’Hébron ou à Hébron même[1]. Hébron, la ville patriarcale par excellence, située à deux pas du désert de Judée et à quelques heures du grand désert d’Arabie, était à cette époque ce qu’elle est encore aujourd’hui, un des boulevards de l’esprit sémitique dans sa forme la plus austère. Dès son enfance, Jean fut nazir, c’est-à-dire assujetti par vœu à certaines abstinences[2]. Le désert dont il était pour ainsi dire environné l’attira tout d’abord[3]. Il y menait la vie d’un yogui de l’Inde, vêtu de peaux ou d’étoffes de poil de chameau, n’ayant pour aliments que des sauterelles et du miel sauvage[4]. Un certain nombre de disciples s’étaient réunis autour de lui, partageant sa vie et méditant sa sévère parole. On se serait cru transporté aux bords du Gange, si des traits particuliers n’eussent révélé en ce solitaire le dernier descendant des grands prophètes d’Israël.

Depuis que la nation juive s’était prise avec une

  1. Luc, i, 39. On a proposé, non sans vraisemblance, de voir, dans « la ville de Juda » nommée en cet endroit de Luc, la ville de Jutta (Josué, xv, 55 ; xxi, 16). Robinson (Biblical Researches, I, 494 ; II, 206) a retrouvé cette Jutta portant encore le même nom, à deux petites heures au sud d’Hébron.
  2. Luc, i, 15.
  3. Ibid., i, 80.
  4. Matth., iii, 4 ; Marc, i, 6 ; fragm. de l’Évang. des ébionim, dans Épiph., Adv. hær., xxx, 13.