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server son vieux crâne des névralgies, formait autour de sa tête un bourrelet hideux. Avec cela, éloquent, passionné, étrange, parfois ironique, spirituel, incisif. Il avait peu de culture littéraire, mais sa parole était pleine de saillies inattendues. On sentait une puissante individualité, que la foi s’était assujettie, mais que la règle ecclésiastique n’avait pas domptée. C’était un saint ; c’était à peine un prêtre ; ce n’était pas du tout un sulpicien. Il manquait à la première règle de la compagnie, qui est d’abdiquer tout ce qui peut s’appeler talent, originalité, pour se plier à la discipline d’une commune médiocrité.

M. Pinault avait commencé par être professeur de mathématiques dans l’université. Comment associa-t-il à des études qui, selon nous, excluent la foi au surnaturel, un catholicisme fervent ? De la même manière que M. Cauchy fut à la fois un mathématicien de premier ordre et un fidèle des plus dociles ; de la même manière que l’académie des sciences possède encore aujourd’hui dans son sein un grand nombre de croyants. Le christianisme se