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dénomination très fautive, comma je l’ai montré dans mon introduction. Mais enfin elle est consacrée par l’usage de tous les savants, et ja n’ai pas dû m’en écarter. Elle est fautive, dis-je ; car d’une part, elle est fondée sur une pure hypothèse, celle de l’ethnographie mosaïque ; et de l’autre, elle est même fausse au point de vue de cette hypothèse, puisque plusieurs des descendants de Sem, Élam, Lud, Arphaxad, ou plutôt las peuples dont ils sont les éponymes ne parlaient pas de langues sémitiques, et que d’autre part des peuples sortis de Cham, comme les Chananéens et plusieurs tribus arabes, parlèrent des langues sémitiques. C’est ce que j’ai longuement prouvé dans mon introduction. Leur vrai nom, formé sur l’analogie de celui de la famille indogermanique, où le tout est désigné par le nom des deux extrêmes, eût été araméo-arabiques, mais l’euphonie ne le permettait pas, et d’ailleurs l’autre dénomination n’a pas d’inconvénient, du moment ou l’on s’entend sur sa vraie valeur.

Tu seras peut-être curieuse de savoir le sens de l’épigraphe que j’ai mise à mon manuscrit. Le voici, mais dénué de l’élégance qui en fait le charme, et qui ne peut pas se traduire : Elles n’ont pas toutes tes mêmes traits, et pourtant n’ont pas des traits divers, comme il convient à des sœurs. Ces vers qui dans Ovide[1] s’appliquent

  1. Ovide, Métamorphoses, II, 13-14.

    Facies non omnibus una, non diversa tamen,
    Qualem decet esss sororum.

    Ovide parle non des Grâces, mais des nymphes de la mer.