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entrepris. Du reste, bonne amie, je crois t’avoir déjà dit que je suis infiniment peu sensible à toutes ces misères et n’était la peine que j’ai à faire solder mon compte et surtout à obtenir intégralement ce qui m’est dû, je passerais, je crois, volontiers, sur tout le reste, L’avenir et l’espérance me consolent du présent, et ta pensée aussi, chère Henriette. Rien ne m’est plus pénible, quand je songe que toutes ces épines passagères me préparent un bonheur qui ne sera pas pour moi seul.

Mon travail avance, chère amie, d’une manière satisfaisante ; je suis content de la tournure qu’il prend, et je crois qu’il sera dans le bon genre. Néanmoins le terme est bien court pour les développements que je voulais lui donner, et à la lettre, je n’ai plus un instant à perdre. Ce qui me rassure un peu, c'est que j’ai remarqué dans les procès-verbaux de la commission, que souvent elle accordait la préférence moins à des ouvrages achevés et complets, qu’à ceux qui pouvaient prêter à d’heureux développements et en contenaient le germe. M. Reinaud, que je vois fort souvent depuis l’ouverture des cours, se doute de l’affaire. Il était placé à côté de M. Julien, à la Bibliothèque Royale, lorsque je lui en parlai pour la première fois, et il entendit toute notre conversation ; il n’est guère facile, en effet, de parler bas avec M. Julien. Depuis, il me témoigne des égards tout particuliers à son cours, et toutes les fois qu’il me rencontre travaillant à la Biblio-