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idées françaises ont tout envahi le pays. J’allai l’autre jour pour voir Stenterello, qui de temps immémorial, comme le Pulcinella de Rome et le Sebeto de Naples, à le privilège de faire rire les joyeux habitants des bords de l’Arno. Hélas ! quelle fut ma surprise ! L’innocent Stenterello était devenu le Chiffonnier de Florence, et le Chiffonnier de Florence, c’était la traduction fidèle du Chiffonnier de Paris de Félix Pyat. Il n’y a plus de peuple, ma chère amie.

E. RENAN.


A MONSIEUR RENAN


(sans date.)

J’étais assurée que Florence te plairait, cher ami ; j’en ai aussi conservé les meilleurs souvenirs. N*est-ce pas que la vallée de l’Arno est charmante, vue des hauteurs de Fiesole ? Tous les environs de Florence sont délicieux, et la ville elle-même est remplie de sujets d’observation. Oui, j’ai bien aimé tous les lieux dont tu me parles, et les voir passer sous tes yeux me cause une bien vive joie. — Le tombeau que tu as vu à Santa-Croce est celui de la grand’mère de mes élèves ; ce fut nécessairement le but de notre première visite à Florence. Par une coïncidence singulière, la lettre où tu m’en parlais m’est arrivée le 28 février, jour anniversaire de ta naissance et de la mort de cette dame. Le tombeau