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jours ; à la ville, il y a toujours des sorties inévitables. — Lorsque tu auras reçu cette lettre, mon Ernest, écris-moi à Varsovie, à l’adresse ordinaire. Je ne sais en aucune manière quand nous partirons ; cependant il est probable que ce sera avant l’arrivée de ta réponse déjà vivement désirée. Dans tous les cas, on me l’enverrait régulièrement de Varsovie.

Depuis longtemps j’attends à chaque courrier des nouvelles de notre mère  ; il y a plus de deux mois que je n’en ai reçu que par toi, aussi je te remercie beaucoup de celles que tu m’as données. La dernière lettre de ma pauvre Emma est désolante : la malheureuse femme se sent perdue, et me supplie de ne pas mettre d’obstacle au cher projet que tu as formé, mon Ernest, et dont la réalisation est, dit-elle, l’un de ses derniers vœux. — Dès aujourd’hui je vais, cher ami, te parler franchement sur ce projet. Mettant à part la joie immense de t’être plus tôt réunie, je n’y vois d’autre avantage que de m’offrir un prétexte à l’égard du père de mes élèves. Tu comprendras tout de suite que le voyage de Varsovie à Venise n’est pas plus facile et presque aussi long que celui de Varsovie à Paris, surtout on considérant qu’on peut, sans interruption, faire ce dernier en chemin de fer. Or, mon Ernest, acheter un prétexte de l’énorme dépense qu’amènerait mon voyage de Venise à Paris, me semble un peu cher. (J’évalue à peu près au même prix le voyage de Varsovie à Venise ou à Paris.) Mon élève mariée habite la