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çaise. La philosophie écossaise est celle que je connais le mieux » Mais la seconde partie de la question étant toute d’histoire contemporaine, devenait fort délicate. J’ai encore été le second. Mais comme le premier de chacune des compositions était assez bas dans l’autre, je me suis trouvé de fait le premier sur la liste des admissibles.

Sont venues les argumentations. Ici, chère amie, je le dirai franchement, je suis très mécontent de moi-même. Le sort m’a peu favorisé. Il m’a donné des antagonistes peu aimables et peu capables, des questions d’un médiocre intérêt et ne prêtant pas à la discussion (la morale de Locke et la logique d’Aristote). D’ailleurs cette guerre simulée ne m’allait pas, cette forme me gênait ; enfin pour comble de malheur, j’étais à ce moment fort découragé. Toutes les fois que j’ai fait quelque chose, il est immanquable que le lendemain je le trouverai détestable. Cela m’arriva pour mes compositions, je croyais être mal placé. — Enfin est arrivée l’épreuve de la leçon. Ici, chère amie, laisse-moi te dire avec franchise des choses qui, dites à d’autres, ne seraient que ridicule et fatuité. Cette leçon, je t’assure, m’a révélé à moi-même pour la parole improvisée. Le sort m’avait donné pour sujet : la Providence et le gouvernement de l’univers. Ce magnifique sujet rentrait fort bien dans mes pensées habituelles, j’y ai rattaché toutes mes vues originales, surtout en ce qui concerne l’histoire et le développement de l’humanité. Ç’a été un vrai succès, et à ma sortie