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490 MÉLANGES D’HISTOIRE.

plus d’un siècle, le grand schisme d’Occident, les révolutions démocratiques de Paris, le rôle politique joué par l’Université, assurent au XIVe siècle une place distincte dans l’histoire des progrès de la France. Ce caractère imposa à M. Le Clerc une méthode un peu différente de celle qu’avaient suivie dom Rivet et M. Daunou. Son discours fut moins exclusivement littéraire ; il s’y préoccupa des hommes et des choses autant que des livres ; il suppléa, par l’étendue des vues d’ensemble, à l’intérêt qui pourra manquer aux notices particulières dont se composeront les volumes suivants. Il résulta de là un vaste exposé plein de choses neuves et rares. Nous ne prétendons pas que ce grand ouvrage soit sans défauts : il porte certaines traces de fatigue ; M. Le Clerc le termina d’une plume déjà fort appesantie, par l’âge. La vieillesse, loin de nuire à la maturité de son jugement, l’avait perfectionné ; mais il lui était devenu difficile d’éviter quelque prolixité, quelques embarras de style. Tel qu’il est, le discours sur le XIVe siècle est un trésor de science historique, une des œuvres critiques les plus solides de notre temps.

M. Le Clerc débute par le tableau de l’état religieux et politique du monde. Il montre l’abaissement de la papauté, devenue l’otage de la France, la corruption de l’Église, les tentatives avortées de réformes, les ordres religieux en leur plus grande décadence, les rivalités et les haines des dominicains et des franciscains. Plus de saints, plus de croisades, plus de mysticité ! L’Église essaye de maintenir son règne par la terreur ; elle s’arme d’un droit redoutable, établit des lois de procédure odieuse, pose en principe que, dans les matières de foi, être soupçonné, c’est être criminel. Elle se décime elle--