JOSEPH-VICTOR LE CLERC. 473
et où se réunissent ses continuateurs, eût été satisfait de voir au bout d’un siècle son esprit si bien compris et son œuvre en si bonnes mains.
On venait de livrer au public le tome XIX, avec lequel on croyait avoir presque atteint la fin du XIIIe siècle. M. Daunou avait annoncé résolûment que le tome XX serait le dernier consacré à ce grand siècle ; il avait compté sans le zèle de ses successeurs. D’énormes suppléments arrivèrent de toutes parts ; les annales littéraires de ce siècle mémorable ne finirent qu’avec le tome XXIII. C’est que le XIIIe siècle est, à beaucoup d’égards, le XVIIe siècle du moyen âge. Comme le XVIIe siècle il hérita d’une brillante époque antérieure, il vit la France exercer en Europe un ascendant universel ; sur sa fin, il inclina vers la décadence. Comme le XVIIe siècle aussi, le XIIIe siècle eut une conscience historique très-claire, et légua une image très-ferme de lui-même à la postérité. Certes, au XIIIe siècle, il est permis de préférer le XIIe, au moins en ce qui concerne l’originalité. Le XIIe siècle fut vraiment le grand siècle créateur du moyen âge, le moment d’épanouissement du génie français. Le temps de Louis le Jeune, de Suger, de Philippe-Auguste, montre plus d’éveil que celui de saint Louis. Alors naissent la scolastique, l’architecture gothique, les rédactions des poëmes de geste, les écoles qui, en se groupant, formeront l’Université de Paris, la vraie France avec sa claire notion de l’état laïque. L’administration de Suger et le règne de Philippe-Auguste sont le point culminant de la première gloire française, une image de ce que seront plus tard les règnes de Richelieu et de Louis XIV. Le XIIIe siècle vit plutôt avorter des espérances que naître de grandes choses. Il ne sut pas