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L’INSTRUCTION PUBLIQUE EN CHINE.

les nations tartares qui entamèrent à cette époque le territoire de l’empire ou qui se trouvèrent en contact avec la civilisation chinoise, se hâtèrent d’adopter l’institution des concours. Kublaï et les souverains mongols qui régnèrent sur la Chine après les Soung se montrèrent, il est vrai, peu favorables à ce système, qui eût conféré à la nation conquise une trop grande part dans le gouvernement. Les grades littéraires ne purent donner accès qu’aux places inférieures, et encore les candidats mongols avaient-ils un visible avantage sur les indigènes. Mais, aussitôt qu’une nouvelle dynastie chinoise eut remplacé cette dynastie conquérante, on vit revivre les anciennes institutions, et, lorsque les Mantchoux imposèrent de nouveau à la Chine une domination étrangère, ils respectèrent l’ordre établi, ordre qui est encore aujourd’hui une des bases de la constitution chinoise. De graves abus, toutefois tels que l’histoire en présente lors de la décadence de chaque dynastie, se sont introduits dans la direction des concours. L’achat des grades, la substitution trop souvent tolérée des candidats, la faveur achetée à prix d’argent, les irrégularités du ministère des offices, qui est loin de ne considérer dans la distribution des emplois que le titre littéraire, sont autant de plaies qui ont porté atteinte à cette antique institution nationale. « Il résulte de l’aperçu de la situation actuelle, dit M. Biot, qu’il existe des germes de désunion entre les Mantchoux, qui ont le pouvoir suprême, et la vaste corporation des lettrés chinois, qui est répandue dans tout l’empire… Des sociétés secrètes, formées par les lettrés, comptent beaucoup d’adhérents dans diverses provinces de la Chine ; mais probablement elles ne se sentent pas encore assez fortes pour