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pratiquait de son temps à la Mecque, me semble très-caractéristique de ce culte triste, sans grâce, sans variété, sévère comme le désert, qui a toujours été celui de l’islamisme. « On place la chaire bénie contre le côté de la noble Caaba qui est entre la pierre noire et l’angle de l’Irak. Le prédicateur s’avance, habillé entièrement de noir, coiffé d’un turban et d’un voile de mousseline de même couleur. Il est rempli de gravité et de dignité, et marche en se balançant entre deux drapeaux noirs, portés par deux muezzins. Il est précédé par un des administrateurs du temple, agitant une sorte de fouet dont les claquements avertissent de la sortie du prédicateur les fidèles qui se trouvent au dehors, et par le chef des muezzins, habillé également de noir, et portant sur son épaule une épée dont il tient la garde avec la main. On fixe les deux étendards des deux côtés de la chaire, et, au moment où le prédicateur se dispose à monter, le muezzin lui passe l’épée, avec laquelle il frappe sur chaque marche pour attirer l’attention des assistants. Arrivé au haut de la chaire, il se tourne vers le public en saluant de droite et de gauche, et l’assistance lui rend son salut. Il s’assied alors, et tous les crieurs font l’appel de la prière du haut de la coupole de Zemzem. Lorsque l’appel est fini, le prédicateur prononce un discours dans lequel il multiplie les prières pour Mahomet, pour les quatre premiers califes, pour les souverains musulmans, puis il s’en retourne, précédé des deux drapeaux, et on remet la chaire à sa place. » Que dirait-on parmi nous d’un prédicateur qui monterait en chaire un sabre à la main et en faisant claquer un fouet devant lui ?

Cette âpreté, ce défaut d’onction et de mysticité tien-