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croient avoir le monopole de la vérité. Mais il faut que ceux-là renoncent à être les maîtres du monde. Galilée, de nos jours, ne se mettrait plus à genoux pour rétracter ce qu’il saurait être la vérité.

Vous me permettrez, dans l’accomplissement de ma tâche, de descendre jusqu’aux plus menus détails, et d’être habituellement technique et austère. La science, messieurs, n’atteint son but sacré, qui est la découverte de la vérité, qu’à condition d’être spéciale et rigoureuse. Tout le monde n’est pas destiné à être chimiste, physicien, philologue, à s’enfermer dans des laboratoires, à suivre durant des années une expérience ou un calcul ; tout le monde participe pourtant des grands résultats philosophiques de la chimie, de la physique, de la philologie. Présenter ces résultats dégagés de l’appareil qui a servi à les découvrir, est une chose utile et que la science ne doit pas s’interdire. Mais telle n’est pas la destination du Collège de France ; tout l’appareil de la science la plus spéciale et la plus minutieuse doit être ici déployé. Des démonstrations laborieuses, de patientes analyses, n’excluant, il est vrai, aucun développement général, aucune digression légitime : tel est le programme de ces cours. C’est le laboratoire même de la science philologique qui est ouvert au public, pour que des vocations spéciales se forment et que les personnes du monde puissent se faire une idée des moyens qu’on emploie pour arriver à la vérité.

Aujourd’hui, messieurs, je dérogerais à l’usage et je tromperais votre attente, si je débutais par des développements trop techniques. J’aurais voulu rappeler parmi vous le souvenir du confrère illustre que j’ai l’honneur