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Chez ceux mêmes qui entrevirent une solution meilleure, tels que Roquefort, Raynouard, quel manque absolu de méthode et de sentiment philologique ! Ce fut un Allemand, M. Diez, qui, dans son excellent écrit sur les langues romanes, nous révéla nos propres origines. Heureusement il fut compris à demi-mot, et, avant qu’il eût achevé sa démonstration, M. Ampère la développait déjà parmi nous, avec cette habileté et cette finesse d’aperçus qui égalent presque le mérite de la découverte. Une série de travaux ingénieux fut le fruit de cette direction nouvelle, qui semble loin d’être épuisée, puisqu’une seule année a pu ajouter trois publications fort estimables à celles que nous possédions déjà sur le même sujet[1].

Le nom de M. du Méril promettait un de ces vastes répertoires de faits et de considérations qui, s’ils ne présentent pas la solution dans ses formes nettes et dégagées, la renferment implicitement, et laissent le plaisir de la déduire aux esprits pénétrants, plus jaloux de chercher la vérité que de la trouver toute faite. La sincérité de la critique oblige de dire, il est vrai, que tout en ce travail si méritoire n’est pas d’égale valeur, que l’ordonnance du livre laisse beaucoup à désirer, que la méthode n’a pas toujours cette sûreté que nous sommes accoutumés à trouver dans les ouvrages de philologie comparée, que la partie étymologique enfin offre de regrettables écarts qui rappellent trop souvent les procé-

  1. Depuis la rédaction de cet article, M. Diez a donné au public un autre travail important, un Dictionnaire étymologique et comparé de langues romanes (Bonn, 1853). Les observations auxquelles donnerait lieu ce nouvel ouvrage sont trop nombreuses pour être touchées ici : il suffit de le signaler comme un complément nécessaire aux travaux grammaticaux du même auteur.