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l’œuvre primitive, en ont altéré le caractère individuel et l’ont transformée en un poëme cyclique. C’est bien vraiment l’épopée de la Perse. Quoique les Persans musulmans le lisent eux aussi avec délices, ce sont surtout les Parsis qui le copient ; le livre est presque devenu un livre parsi, et, si un jour, comme on peut le croire, la Perse repousse le joug de l’islam, le Livre des Rois redeviendra son livre national. Firdousi croit à la gloire ; il est humain ; il aime le bien ; la civilisation est pour lui le but que le monde poursuit, nonobstant la fragilité des individus. Ce n’est pas un Arabe, c’est un des nôtres ; avec Hafiz et Kheyyam, il caractérise cet étonnant phénomène que présente la littérature persane, la persistance obstinée du génie indo-européen au travers des plus tristes aventures de l’histoire asiatique.