Page:Renan - Marc-Aurèle et la Fin du monde antique.djvu/95

Cette page a été validée par deux contributeurs.

pouvait presque lire le livre sans être choqué. Peu à peu, en effet, cette histoire calomnieuse des luttes apostoliques, inventée par une école haineuse, mais qui avait des parties faites pour plaire à tous les chrétiens, perdit sa couleur sectaire, devint presque catholique et se fit adopter de la plupart des fidèles. Les allusions contre saint Paul étaient devenues assez obscures. Simon le Magicien restait chargé de tout l’odieux du récit ; on oubliait les allusions que son nom avait servi à voiler, on ne voyait plus en lui qu’un dédoublement de Néron dans le rôle infernal de l’Antechrist[1].

L’ouvrage est composé selon toutes les règles du roman antique. Rien n’y manque : voyages, épisodes d’amour, naufrages, jumeaux qui se ressemblent, gens pris par les pirates, reconnaissances de personnes qu’une longue série d’aventures avaient séparées. Clément, par suite d’une confusion qui se produisit dès une époque fort ancienne[2], est considéré comme appartenant à la famille impériale[3]. Mattidie, sa mère, est une dame romaine parfaitement chaste, mariée au noble Faustus. Poursuivie d’un amour cri-

  1. Homél., ii, 17.
  2. Voir les Évangiles, p. 311 et suiv.
  3. Homél., xii, 8 et suiv. Les noms de Mattidie et de Faustine sont empruntés à la famille d’Adrien.