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premier de tous, le vrai compagnon, le vrai ami de Jésus, constitué par Jésus base unique de l’Église, l’a établi, lui Clément, comme son successeur dans l’épiscopat de Rome, et lui a recommandé d’écrire en abrégé et d’adresser à Jacques le récit de leurs voyages et de leurs prédications en commun[1]. L’ouvrage ne parle pas du séjour de Pierre à Rome ni des circonstances de sa mort. Ces derniers récits formaient sans doute le fond d’un second ouvrage qui servait de suite à celui qui nous a été conservé[2].

L’esprit ébionite, hostile à Paul, qui faisait le fond des premiers Cerygmata[3], est ici fort effacé. Paul n’est pas nommé dans tout l’ouvrage. Ce n’est sûrement pas sans raison que l’auteur affecte de ne connaître en fait d’apôtres que les douze présidés par Pierre et Jacques, et qu’il attribue à Pierre seul l’honneur d’avoir répandu le christianisme dans le monde païen. En une foule d’endroits, les injures des judéo-chrétiens se laissent encore entrevoir ; mais tout est dit à demi-mot ; un disciple de Paul

  1. Lettre de Clément à Jacques, en tête du roman. On joignit à cette lettre, comme introduction du roman, la lettre de Pierre à Jacques et la Diamartyria de Jacques, qui se trouvaient en tête des anciens Cerygmata.
  2. Epist. Clem. ad Jac., 19.
  3. Voir l’Église chrétienne, p. 324 et suiv. ; E. Westerburg, Der Ursprung der Sage, daß Seneca Christ gewesen sei (Berlin, 1881).