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bas-fonds de la niaiserie paphlagonienne[1], trouva des adhérents dans les plus hauts rangs de la société romaine, dans l’entourage de Marc-Aurèle. Sévérien, légat de Cappadoce, s’y laissa prendre[2]. On voulut voir l’imposteur à Rome ; un personnage consulaire, Publius Mummius Sisenna Rutilianus[3], se fit son apôtre, et, à soixante ans, se trouva honoré d’épouser une fille que ce drôle de bas étage prétendait avoir eue de la Lune. À Rome, Alexandre établit des mystères qui duraient trois jours : le premier jour, on célébrait la naissance d’Apollon et d’Esculape ; le second jour, l’épiphanie de Glycon ; le troisième, la nativité d’Alexandre ; le tout avec de pompeuses processions et des danses aux flambeaux. Il s’y passait des scènes d’une révoltante immoralité[4]. Lors de la peste de 166, les formules talismaniques d’Alexandre, gravées sur les portes des maisons, passèrent, aux yeux de la foule superstitieuse, pour des préservatifs. Lors de la grande guerre de Pannonie (169-171), Alexandre fit encore parler son serpent, et ce fut par ses ordres qu’on jeta dans le Danube deux lions vivants, avec des sacrifices solennels.

  1. L’Église chrét., p. 428 et suiv.
  2. Lucien, Alex., 26.
  3. Henzen, no 649 ; Waddington, Fastes, p. 235 et suiv.
  4. Lucien, Alex., 30, 31, 36, 38, 39, 40, 42.