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fonctions sacerdotales dans leurs villes respectives[1]. Ainsi le stoïcisme, qui contribua si puissamment à l’amélioration des âmes, fut faible contre la superstition ; il éleva les cœurs, non les esprits. Le nombre des vrais savants était imperceptible. Galien même n’est pas un esprit positif ; il admet les songes médicaux et plusieurs des superstitions du temps[2]. Malgré les lois[3], les magiciens les plus malfaisants réussissaient. L’Orient, avec son cortège de chimères, débordait[4]. En province, toutes les folies trouvaient des adeptes.

La Béotie avait un demi-dieu, un certain Sostrate, espèce de colosse idiot, menant une vie sauvage, dans lequel tous voyaient Hercule ressuscité. On le considérait comme le bon génie de la contrée, et on le consultait de toutes parts[5].

Chose plus incroyable ! la sotte religion d’Alexandre d’Abonotique, que nous avons vue naître dans les

  1. Plutarque, Favorinus, Hérode Atticus, Ælius Aristide.
  2. De libris propr., 2 ; Meth. med., IX, 4 ; XIV, 8 ; De prænot. ad Posth., 2. Cf. Alex, de Tralles, IX, 4. Voir l’Église chrét., p. 431.
  3. Paul, V, xxi, 1. « Vaticinatores, qui se Deo plenos adsimulant, idcirco civitate expelli placuit, ne humana credulitate publici mores ad spem alicujus rei corrumperentur, vel certe ex eo populares animi turbarentur. » Cf. ibid., xxxiii, 9 et suiv.
  4. Oneirocritique d’Artémidore ; Apulée, Apologie, etc.
  5. Lucien, Demonax, 1 ; Philostrate, Soph., II, i, 12-16.