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doute le christianisme ; mais ce fut avant tout l’Orient. L’Orient, c’est-à-dire la moitié de l’empire parlant grec, avait, depuis la mort de Marc-Aurèle, pris de plus en plus le dessus sur l’Occident, parlant latin. L’Orient était plus libre, plus vivant, plus civilisé, plus politique. Déjà Dioclétien avait transporté à Nicomédie le centre des affaires. En bâtissant une Nouvelle Rome, sur le Bosphore, Constantin réduisit la vieille Rome à n’être plus que la capitale de l’Occident. Les deux moitiés de l’empire devinrent ainsi presque étrangères l’une à l’autre. Constantin est le véritable auteur du schisme entre l’Église latine et l’Église grecque. On peut dire aussi qu’il posa la cause éloignée de l’islamisme. Les chrétiens parlant syriaque et arabe, persécutés ou mal vus par les empereurs de Constantinople, devinrent un élément essentiel de la clientèle future de Mahomet.

Les cataclysmes qui suivirent la division des deux empires, les invasions des barbares, qui épargnèrent Constantinople et tombèrent sur Rome de tout leur poids, réduisirent l’antique capitale du monde à un rôle borné, souvent humble. Cette primauté ecclésiastique de Rome, qui éclate avec tant d’évidence au iie et au iiie siècle, n’existe plus depuis que l’Orient a une existence et une capitale séparées. L’empire chrétien, c’est l’empire d’Orient, avec ses