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d’églises ou de synagogues, de chapelles, une religion où l’essence du culte fût la réunion, l’association, la fraternité. Le christianisme remplissait toutes ces conditions. Son culte admirable, sa morale pure, son clergé savamment organisé, lui assuraient l’avenir.

Plusieurs fois au iiie siècle, cette nécessité historique faillit se réaliser. Cela se vit surtout au temps de ces empereurs syriens, que leur qualité d’étrangers et la bassesse de leur origine mettaient à l’abri des préjugés, et qui, malgré leurs vices, inaugurent une largeur d’idées et une tolérance inconnues jusque-là. La même chose se revit sous Philippe l’Arabe[1], en Orient sous Zénobie, et, en général, sous les empereurs que leur origine mettait en dehors du patriotisme romain.

La lutte redoubla de rage quand les grands réformateurs, Dioclétien et Maximien, crurent pouvoir donner à l’empire une nouvelle vie. L’Église triompha par ses martyrs ; l’orgueil romain plia ; Constantin vit

  1. Sur le christianisme de Philippe et de sa femme Otacilia Severa, voir Tillemont, Emp., III, p. 262 et suiv., 494 et suiv. ; De Witte, Du christ. de quelques emper., p. 7 et suiv. ; Aubé, Revue archéol., sept. 1880. Notez surtout Denys d’Alex., dans Eus., H. E., VII, x, 3 ; xli, 9. Sur Salonine, voir De Witte, ibid., p. 13 et suiv. ; Notice sur Cavedoni, p. 33. Ce qui rend croyables les liens de Philippe avec l’Église, c’est que le christianisme était très répandu dans le Hauran, sa patrie.