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persécutés d’aujourd’hui trouveront que l’ingérence de l’État dans le domaine de la conscience est parfaitement légitime.

La haine entre le christianisme et l’empire était la haine de gens qui doivent s’aimer un jour. Sous les Sévères, le langage de l’Église reste ce qu’il fut sous les Antonins, plaintif et tendre. Les apologistes affichent une espèce de légitimisme, la prétention que l’Église a toujours salué tout d’abord l’empereur[1]. Le principe de saint Paul portait ses fruits : « Toute puissance vient de Dieu ; celui qui tient l’épée la tient de Dieu pour le bien. »

Cette attitude correcte à l’égard du pouvoir tenait à des nécessités extérieures tout autant qu’aux principes mêmes que l’Église avait reçus de ses fondateurs. L’Église était déjà une grande association ; elle était essentiellement conservatrice ; elle avait besoin d’ordre et de garanties légales. Cela se vit admirablement dans le fait de Paul de Samosate, évêque d’Antioche sous Aurélien[2]. L’évêque d’Antioche pouvait déjà passer, à cette époque, pour un haut personnage. Les biens de l’Église étaient

    λείαν Athénagore, Leg., 37 ; Tertullien, Apol., 30. Comparez fvndatori qvietis, dans l’inscription de l’Arc de Constantin.

  1. Voir ci-dessus, p. 593-594.
  2. Voir Eusèbe, H. E., VII, 36.