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sentiment plus chrétien que patriotique, abandonna la ville révolutionnaire et alla chercher la paix au-delà du Jourdain. Dans la révolte de Bar-Cobiza, la séparation fut encore plus caractérisée. Pas un seul chrétien ne voulut prendre part à cette tentative d’un aveugle désespoir. Saint Justin, dans ses Apologies, ne combat jamais le principe de l’empire ; il veut que l’empire examine la doctrine chrétienne, l’approuve, la contre-signe en quelque sorte et condamne ceux qui la calomnient[1]. Nous avons vu le premier docteur du temps de Marc-Aurèle, Méliton, évêque de Sardes, faire des offres de service bien plus caractérisées encore, et présenter le christianisme comme la base d’un empire héréditaire et de droit divin[2]. Dans son traité de la Vérité, conservé en syriaque, Méliton s’exprime à la façon d’un évêque du ive siècle, exposant à un Théodose que son premier devoir est de procurer le triomphe de la vérité (sans nous dire, hélas ! à quel signe on reconnaît la vérité). Tous les apologistes flattent l’idée favorite des empereurs, celle de l’hérédité en ligne directe, et les assurent que l’effet des prières chrétiennes sera que leur fils règne après eux[3]. Que l’empire devienne chrétien, et les

  1. Apol. II, 14.
  2. Voir ci-dessus, p. 283.
  3. Ἵνα παῖς μὲν παρὰ πατρὸς κατὰ τὸ δικαιότατον διαδέχησθε τῆς βασι-