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riches) et des humiliores ou tenuiores (les pauvres)[1]. En proclamant l’égalité politique de tous, on introduisit l’inégalité dans la loi, surtout dans la loi pénale. La pauvreté rendait presque illusoire le titre de citoyen romain[2], et le grand nombre était pauvre. L’erreur de la Grèce, qui avait été le mépris de l’ouvrier et du paysan[3], n’avait point disparu[4]. Le christianisme ne fit d’abord rien pour le paysan ; il nuisit même aux populations rurales par l’institution de l’épiscopat, à l’influence et aux bienfaits duquel les villes seules avaient part ; mais il eut une influence de premier ordre sur la réhabilitation de l’ouvrier. Une des recommandations que l’Église fait à l’artisan est de s’acquitter de son métier avec goût et application[5]. Le mot d’operarius se relève ; dans leurs épitaphes, l’ouvrier et l’ouvrière chrétiens sont loués d’avoir été de bons travailleurs[6].

  1. Duruy, Hist. rom., V, p. 487 et suiv. Cf. Paul, V, xxii, 1.
  2. Digeste, XLVIII, ii, 10, De accusationibus.
  3. Platon, Républ., V, iii, 4 ; Aristote, Polit., III, 5 ; IV, 8 ; Xénoph., Œcon., IV, 2 ; Plut., Périclès, 2.
  4. Cic., Tusc., V, 36 ; De off., I, 42 ; Pro Flacco, 18 ; Pro domo sua, 33 ; Sénèque, De benef., VI, 18 ; Val. Max., V, ii, 10 ; Suétone, Claude, 22 ; Dion Chrys., Or., xxiv, t. II, p. 43, Reiske ; Celse, dans Orig., I, 28, 29.
  5. Constit. apost., I, 4.
  6. De Rossi, Inscr. christ., I, p. 49, no 62 (amatrix pavperorvm et operaria) ; Bull., 1865, p. 52-53 (laborvm