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cet avènement était inévitable. Méliton avait raison[1]. Le christianisme était destiné à être la religion de l’empire romain. L’Occident se montrait encore bien réfractaire ; l’Asie Mineure et la Syrie, au contraire, comptaient des masses denses de populations chrétiennes augmentant chaque jour en importance politique. Le centre de gravité de l’empire se transportait de ce côté. On sentait déjà qu’un ambitieux aurait la tentation de s’appuyer sur ces foules, que la mendicité mettait entre les mains de l’Église et que l’Église, à son tour, mettrait dans la main du césar qui lui serait favorable. Le rôle politique de l’évêque ne date pas de Constantin. Dès le iiie siècle, l’évêque des grandes villes d’Orient se montre comme un personnage analogue à ce qu’est, de nos jours, l’évêque en Turquie, chez les chrétiens grecs, arméniens, etc. Les dépôts des fidèles, les testaments, la tutelle des pupilles, les procès, toute l’administration, en un mot, de la communauté lui sont confiés. C’est un magistrat à côté de la magistrature publique[2], bénéficiant de toutes les fautes de celle-ci. L’Église,

  1. Voir ci-dessus, p. 283 et suiv.
  2. Notez le rôle extraordinaire de saint Babylas à Antioche. Sur Paul de Samosate, voir ci-après, p. 618-619. Les lettres de l’empereur Gallien aux évêques sont bien remarquables (Eus., H. E., VII, ch. xiii).