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sabazies phrygiennes n’avait pas disparu, mais était masquée par une teinture de panthéisme et de mysticité, parfois par un scepticisme tranquille à la façon de l’Ecclésiaste[1].

On peut dire que, si le christianisme eût été arrêté dans sa croissance par quelque maladie mortelle, le monde eût été mithriaste. Mithra se prêtait à toutes les confusions, avec Attis, avec Adonis, avec Sabazius, avec Mên[2], qui étaient déjà en possession depuis longtemps de faire couler les larmes des femmes. Les soldats aussi affectionnaient ce culte. En rentrant dans leurs foyers, ils le portaient aux provinces frontières, sur le Rhin, sur le Danube. Aussi le mithriacisme résista-t-il plus que les autres cultes au christianisme. Il fallut, pour l’abattre, les coups terribles que lui porta l’empire chrétien. C’est dans les années 376 et 377 qu’on trouve le nombre

  1. Inscription au moins très équivoque du tombeau de Vincentius (sur le sens de benefac, voir Le Blant, Revue arch., juin 1875, p. 358-362) ; inscription décidément obscène de M. Aurelius, vis-à-vis ; à côté, Vénus aversa. Garrucci, l. c ; Orelli-Henzen, no 6042. Comparez les trouvailles de l’Esquilin mentionnées ci-dessus, p. 578, note.
  2. Maury, Rel. de la Gr., III, p. 93, 131-132. La tombe de Vincentius renferme des particularités qui la rapprochent à la fois des superstitions sabaziennes, mithriaques et même du christianisme. Angelus bonus,… bonorum judicio judicati. Voir Revue arch., nov. et déc. 1874 ; janv. 1875.