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de là, considère les cheveux des femmes comme un simple nid à vermine et recommande de les couper[1].

Le défaut du christianisme apparaît bien ici. Il est trop uniquement moral ; la beauté, chez lui, est tout à fait sacrifiée. Or, aux yeux d’une philosophie complète, la beauté, loin d’être un avantage superficiel, un danger, un inconvénient, est un don de Dieu, comme la vertu. Elle vaut la vertu ; la femme belle exprime aussi bien une face du but divin, une des fins de Dieu, que l’homme de génie ou la femme vertueuse. Elle le sent, et de là sa fierté. Elle sent instinctivement le trésor infini qu’elle porte en son corps ; elle sait bien que, sans esprit, sans talent, sans grande vertu, elle compte entre les premières manifestations de Dieu. Et pourquoi lui interdire de mettre en valeur le don qui lui a été fait, de sertir le diamant qui lui est échu ? La femme, en se parant, accomplit un devoir ; elle pratique un art, art exquis, en un sens le plus charmant des arts. Ne nous laissons pas égarer par le sourire que certains mots provoquent chez les gens frivoles. On décerne la palme du génie à l’artiste grec qui a su résoudre le plus délicat des problèmes, orner le corps humain, c’est-

  1. Epist. 93, Opp., t. IV, 2e partie, col. 757, Mart.