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plus près de ressembler aux temples anciens qu’aux églises du iie siècle.

Une idée bientôt répandue contribua beaucoup à cette transformation ; on se figura que l’eucharistie était un sacrifice, puisqu’elle était le mémorial du sacrifice suprême accompli par Jésus. Cette imagination remplissait une lacune que la religion nouvelle semblait offrir aux yeux des gens superficiels, je veux dire le manque de sacrifices. De la sorte, la table eucharistique devint un autel, et il fut question d’offrandes, d’oblations. Ces oblations, c’étaient les espèces mêmes du pain et du vin, que les fidèles aisés apportaient, pour n’être pas à la charge de l’Église et pour que le reste appartînt aux pauvres et aux servants du culte[1]. On voit combien une telle doctrine pouvait devenir féconde en malentendus. Le moyen âge, qui abusa si fort de la messe, en y exagérant l’idée de sacrifice, devait arriver à de bien grandes étrangetés. De transformations en transformations, on en vint à la messe basse, où un homme, dans un

  1. Clém., Epist., 40, 41, 44 ; Justin, Apol. I, 13 ; Dial., 41, 116 ; Irénée, IX, xvii, 5 ; xviii, 4, 6 ; Tertullien, De corona, 3 ; De exhort. cast., 11 ; De monog., 10 ; saint Cyprien, De opere et eleemosynis, 15 ; Epist., 5, 34, 37, surtout 63 ; Bunsen, Analecta ante-nicæna, II, p. 3 et suiv. L’offrande de la messe est le dernier reste de cet usage.