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déjà, depuis cinquante ans, le quatrième Évangile, si purement spiritualiste, proclame que le royaume de Dieu commence ici-bas, qu’on le porte en soi-même. Caïus, Clément d’Alexandrie, Origène, Denys d’Alexandrie, vont bientôt condamner le rêve des premiers chrétiens et envelopper l’Apocalypse dans leur antipathie. Mais il est trop tard pour supprimer quelque chose d’important. Le christianisme subordonnera l’apparition du Christ dans les nues et la résurrection des corps à l’immortalité de l’âme ; si bien que le vieux dogme primitif du christianisme sera presque oublié et relégué, comme une pièce de théâtre démodée, aux arrière-plans d’un jugement dernier qui n’a plus beaucoup de sens, puisque le sort de chacun est fixé au moment de sa mort. Beaucoup admettent que les peines des damnés ne finiront pas, et que ces peines seront un condiment de la joie des justes[1] ; d’autres croient qu’elles finiront ou seront mitigées[2].

Dans la théorie de la constitution de l’Église, l’idée que la succession apostolique est la base du pouvoir de l’évêque, lequel est ainsi envisagé non comme un délégué de la communauté, mais comme le continuateur des apôtres et le dépositaire de leur autorité,

  1. Tertullien, De spect., 30.
  2. De transitu B. M. V., ch. vi (Enger).