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lots, c’en serait assez pour notre vengeance[1]. » On était patient, car on était sûr de l’avenir[2]. Maintenant, le monde tue les saints ; mais demain les saints jugeront le monde. « Regardez-nous bien tous au visage, pour nous reconnaître au jugement dernier », disait aux païens l’un des martyrs de Carthage[3]. « Notre patience, disaient les plus modérés, nous vient de la certitude d’être vengés ; elle amasse des charbons ardents sur la tête de nos ennemis. Quel jour que celui où le Très-Haut comptera ses fidèles, enverra les coupables à la géhenne et fera flamber nos persécuteurs au brasier des feux éternels ! Quel spectacle immense, quels seront mes transports, mon admiration et mon rire ! Que je trépignerai en voyant gémir au fond des ténèbres, avec Jupiter et leurs propres adorateurs, tant de princes que l’on disait reçus au ciel après leur mort ! Quelle joie de voir les magistrats persécuteurs du nom du Seigneur consumés par des flammes plus dévorantes que celles des bûchers allumés pour les chrétiens[4] ! »

  1. Apol., 37.
  2. Saint Cyprien, De bono patientiæ, entier.
  3. Acta S. Perp., § 17.
  4. Saint Cyprien, Epist., 56, ad Thibaritanos ; liber ad Demetrianum, la fin surtout ; Tertullien, De spect., 30 ; De fuga, 12 ; Ad Scap., 2.