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est, à la lettre, entouré[1]. Ses anciens maîtres sont devenus ses ministres, ses hommes d’État. Il leur prodigue les honneurs, leur élève des statues, place leurs images parmi ses dieux lares, et, à l’anniversaire de leur mort, va sacrifier sur leur tombe, qu’il tient toujours ornée de fleurs[2]. Le consulat, jusque-là réservé à l’aristocratie romaine, se voit envahi par des rhéteurs, par des philosophes. Hérode Atticus, Fronton, Junius Rusticus, Claudius Severus, Proculus, deviennent consuls ou proconsuls à leur jour[3]. Marc-Aurèle avait, en particulier, pour Rusticus l’affection la plus tendre ; il le fit deux fois consul, et toujours il lui donnait l’accolade avant de la donner au préfet du prétoire. Les importantes fonctions de préfet de Rome furent, durant des années, comme immobilisées entre ses mains[4].

Il était inévitable que cette faveur subite, accordée par l’empereur à une classe d’hommes où se mêlaient l’excellent et le méprisable, amenât bien

  1. Hérodien, I, 2 ; Capitolin, Ant. le Phil., 2, 3 ; Dion Cassius, LXXI, 35.
  2. Capitolin, Antonin le Phil., 3.
  3. Tillemont, Hist. des Emp., II, p. 316, 332, 337 ; Capitolin, 2. Quelques-uns de ces consulats eurent lieu dès le temps d’Antonin.
  4. Capitolin, Ant. Phil., 3 ; Themistius, Orat., 13, 17 ; Digeste, XLIX, i, 1, § 3 ; Actes de saint Justin (voir l’Église chrét., p. 492, note) ; Desvergers, p. 53-55.