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lent, la discutent, y font des emprunts[1]. Loin d’être renfermée dans le cercle juif, la religion nouvelle recueille dans le monde païen le plus grand nombre de ses convertis[2], et, du moins à Rome, surpasse en nombre l’Église juive, d’où elle est sortie[3]. Elle n’est ni le judaïsme ni le paganisme ; c’est une troisième religion définitive[4], destinée à remplacer tout ce qui a précédé.

Les chiffres sont, en pareille matière, impossibles à préciser, et certainement ils différaient beaucoup selon les provinces. L’Asie Mineure continuait d’être la province où la population chrétienne était le plus dense. Elle était aussi le foyer de la piété. Le montanisme semblait le ferment de l’universelle ardeur qui brûlait le corps spirituel de l’Église. Même, en le combattant, on s’animait de ce qu’il y avait en lui de flamme sacrée. À Hiérapolis et dans plusieurs

  1. Épictète (Dissert., II, ix, 20 et suiv.), Dion Cassius (LXVII, 14) confondent cependant encore les juifs et les chrétiens. Notez même, dans Lucien, Peregr., 16, ce qui est dit des nourritures défendues. Voir aussi Lampride, Carac., 1. Les absurdités de Plutarque sur les juifs (Quæst. conv., IV, quæst. vi) nous surprennent.
  2. Justin, Apol. I, 53.
  3. II Clem., ii, 3.
  4. Τρίτον γένος, genus tertium. Petri et Pauli Præd., Hilg., p. 58-59 ; Tertullien, Scorp., 10 ; Ad nat., I, 8-9 ; Epist ad Diogn., 2, 3, 4, 8-9. Voir ci-dessus, p. 424 et suiv. Cf. Constit. apost., VI, 24, 25.