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pour commenter rationnellement les Écritures[1]. Cette école, espèce d’université chrétienne, s’apprêtait à devenir le centre du mouvement de toute la théologie. Un jeune Sicilien converti, nommé Pantænus[2], en était le chef et allait porter dans l’enseignement sacré une largeur d’idées qu’aucune chaire chrétienne n’avait connue jusque-là. Tout lui plaisait, les philosophies, les hérésies, les religions les plus étranges. De tout, il faisait son miel, gnostique dans le meilleur sens, mais éloigné des chimères que le gnosticisme impliquait presque toujours. Dès lors se groupaient autour de lui quelques adolescents à la fois lettrés et chrétiens, en particulier le jeune converti Clément, âgé d’environ vingt ans, et Alexandre, futur évêque de Jérusalem, qui eut, dans la première moitié du iiie siècle, un rôle si considérable. La vocation de Pantænus était surtout l’enseignement oral ; sa parole avait un charme extrême ; il laissa chez ses disciples, plus célèbres que lui, un sentiment profond. Non moins favorable que Justin à la philosophie, il concevait le christianisme comme le culte de tout ce qui est beau. Heureux génie, brillant, lumineux, bienveillant

  1. Eusèbe, V, ch. 10, 11 ; VI, 6, 14, 19 ; saint Jér., De viris ill., 36 ; Épîtres, 83 (Mart., IV, 2e part., col. 656) ; Clém. d’Alex., Strom., I, i, p. 118.
  2. Pantænus pouvait avoir vingt-cinq ans, à l’époque où nous sommes arrivés.