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plus juste. — Octavius triomphe surtout du courage des martyrs.


Quel beau spectacle pour Dieu, quand le chrétien combat avec la douleur, quand il se recueille contre les menaces, les supplices, les tourments, quand il se rit du bruit sinistre de la mort et de l’horreur du bourreau, quand il dresse sa liberté contre les rois, quand, triomphateur et vainqueur, il brave celui qui a prononcé sa sentence de mort ! Vaincre, en effet, c’est savoir atteindre son but !… Le chrétien peut donc sembler malheureux, il ne l’est jamais. Vous élevez au ciel des hommes comme Mucius Scævola, dont la mort était assurée, s’il n’eût sacrifié sa main droite. Et combien des nôtres ont souffert sans une plainte, non seulement que leur main droite, mais que tout leur corps fût brûlé, quand il était en leur pouvoir de se faire relâcher !… Nos enfants, nos femmes se jouent des croix, des tourments, des bêtes, de tout l’appareil des supplices, grâce à une patience qui leur est inspirée d’en haut[1].


Que les magistrats qui président à ces horreurs tremblent ! Dieu ne leur laisse les honneurs et les richesses que pour les perdre ; élevés plus haut, leur chute sera plus lourde. Ce sont des victimes engraissées et déjà couronnées pour la mort. Escortes, faisceaux, pourpres, noblesse du sang, quelles va-

  1. Octav., 37.