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faite de leurs mœurs, malgré les objections que l’on tire du baiser de paix.


Selon la différence des âges, nous traitons les uns de fils et de filles, tels autres de frères et de sœurs, tels autres de pères et de mères ; mais ces titres de parenté n’entraînent aucune souillure. Le Verbe nous dit en effet[1] : « Si quelqu’un réitère le baiser[2] pour se procurer une jouissance de plaisir… » ; et il ajoute : « Il faut être très scrupuleux en ce qui concerne le baiser, à plus forte raison en ce qui concerne le proscynème, puisque, s’il était souillé de la moindre pensée impure, il nous priverait de la vie éternelle. » L’espérance de la vie éternelle nous fait mépriser la vie présente et jusqu’aux plaisirs de l’âme. Chacun de nous use de son épouse selon certaines règles que nous avons posées[3] et dans la mesure qui sert à la génération des enfants ; de même que le laboureur, après avoir confié son grain à la terre, attend la moisson sans rien semer par-dessus. Vous trouverez parmi nous plusieurs personnes de l’un et de l’autre sexe qui vieillissent dans le célibat, espérant ainsi vivre plus près de Dieu… Notre doctrine est que chacun doit rester tel qu’il est né ou se contenter d’un seul mariage. Les secondes noces ne sont qu’un adultère convenablement déguisé…

Que si l’on demande à nos accusateurs s’ils ont vu ce

  1. Leg., 32. L’écrit cité comme inspiré par Athénagore est sans doute quelque recueil de Didascalies apostoliques.
  2. Cf. Saint Paul, p. 262, et ci-après, p. 520.
  3. Leg., 33, ὑφ’ ἡμῶν (édit. Otto). Dom Maran et plusieurs autres critiques lisent ὑφ’ ὑμῶν ; mais jamais les chrétiens ne considèrent le mariage romain comme étant pratiqué parmi eux. Ὑμῶν voudrait dire Marc-Aurèle et Commode, ce qui n’est guère satisfaisant.