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« Un pouvoir éclairé et plus prévoyant, leur dit-il, vous détruira de fond en comble, plutôt que de périr lui-même par vous[1]. » Puis son patriotisme et son bon sens lui montrent l’impossibilité d’une telle politique religieuse. Le livre, qui avait commencé par les réfutations les plus aigres, finit par des propositions de conciliation. L’État court les plus grands périls ; il s’agit de sauver la civilisation ; les barbares débordent de tous les côtés ; on enrôle les gladiateurs, les esclaves. Le christianisme perdra autant que la société établie au triomphe des barbares. L’accord est donc facile. « Soutenez l’empereur de toutes vos forces, partagez avec lui la défense du droit ; combattez pour lui, si les circonstances l’exigent ; aidez-le dans le commandement de ses armées. Pour cela, cessez de vous dérober aux devoirs civils et au service militaire ; prenez votre part des fonctions publiques, s’il le faut pour le salut des lois et la cause de la piété[2]. »

Cela était facile à dire. Celse oubliait que ceux qu’il voulait rallier, il les avait tout à l’heure menacés des plus cruels supplices. Il oubliait surtout qu’en maintenant le culte établi, il demandait aux chrétiens d’admettre des absurdités plus fortes que celles

  1. Orig., VIII, 69, 71.
  2. Ibid., VIII, 73, 75.